Le gouvernement De Croo n’a pas encore choisi entre le plan A (sortie complète du nucléaire) et le plan B (maintien de deux réacteurs). Verdict mi-mars. La sécurité d’approvisionnement est en jeu.
Sortira, sortira pas? La veille de Noël, le gouvernement De Croo a décidé… de ne pas vraiment décider. L’enjeu reste donc brûlant pour ce début 2022. Un nouveau rendez-vous est pris pour la mi-mars afin d’accorder les violons entre des partenaires de majorité qui restent très divisés.
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Sortira, sortira pas? La veille de Noël, le gouvernement De Croo a décidé… de ne pas vraiment décider. L’enjeu reste donc brûlant pour ce début 2022. Un nouveau rendez-vous est pris pour la mi-mars afin d’accorder les violons entre des partenaires de majorité qui restent très divisés. En substance, les écologistes – et singulièrement la ministre en charge de l’Energie, Tinne Van der Straeten (Groen) – restent convaincus qu’il sera possible de réaliser le plan A: fermer l’ensemble des réacteurs nucléaires du pays pour mettre le cap sur le 100% renouvelable en 2050, avec des centrales au gaz pour compenser de façon transitoire. Les libéraux, eux, misent toujours sur le plan B: le maintien des deux réacteurs les plus modernes, en soulignant que les conditions ne sont pas remplies pour sortir du nucléaire sans mettre en péril la sécurité d’approvisionnement du pays. Le plan A reste perturbé par les vicissitudes rencontrées par les deux projets d’Engie ayant remporté les enchères du CRM pour venir en appui du renouvelable: refus de permis en Flandre pour la centrale de Vilvorde, recours citoyen contre celle des Awirs. Ces trois mois, aux yeux des verts, doivent permettre de lever les doutes en débloquant ces situations (Engie va redéposer une demande pour Vilvorde) ou en choisissant un autre projet plus sûr (comme un projet de centrale de Luminus à Seraing). Le plan B, quant à lui, est gratifié de deux petites avancées: une étude de l’Agence de contrôle nucléaire sur la possibilité d’encore prolonger les centrales – un sujet controversé – et un budget de 100 millions d’euros pour mener une recherche sur le nucléaire du futur. En dépit de ces timides avancées, le maintien du nucléaire reste encore et toujours le plan B. “C’est un choix de société avant tout, ce n’est pas un choix technique, souligne Adel El Gammal, professeur à l’ULB et spécialiste de la géopolitique de l’énergie. La meilleure preuve, c’est que deux démocraties avancées ont fait des choix radicalement différents: la France relance le nucléaire et l’Allemagne en sort complètement. Or, ce sont des pays très comparables en termes culturels, sociaux, économiques.” Tant le nucléaire que le gaz sont en passe de recevoir un label “vert” de la part de la Commission européenne, crucial pour les investisseurs. Sans se prononcer personnellement, Adel El Gammal souligne toutefois les risques cachés du nucléaire: gestion des déchets, prolifération et incertitudes en termes de sécurité, etc. Damien Ernst, professeur à l’ULiège, s’emporte, quant à lui: “D’un point de vue économique, géopolitique et environnemental, la sortie du nucléaire est stupide”, lançait-il sur Canal Z à peine l’accord annoncé, parce que “cela va générer une électricité plus chère, plus polluante (le nucléaire est décarboné, pas le gaz, Ndlr) et cela va créer des failles dans la sécurité d’approvisionnement”. En attendant, la sécurité d’approvisionnement pourrait déjà être mise à mal par l’explosion des coûts du gaz, intense ces derniers mois, même si un petit recul a été constaté autour de Noël, dans un climat géopolitique tendu. “Nous sommes dans un système plein d’incertitudes cumulées, souligne Adel El Gammal. On sait que les stocks de gaz sont bas: si la crise n’est pas résolue avec la Russie et si l’hiver est froid, on risque d’avoir des ruptures d’approvisionnement. Plusieurs pays l’envisagent déjà. C’est une réalité.”