Quand fonds publics et fonds privés jouent la complémentarité

LA FIDUCIAIRE

Experts-Comptables ITAA

Une étude publiée aux Etats-Unis et à laquelle ont participé deux professeurs de Solvay recense les conditions qui permettent au financement public d’attirer le financement privé.

Des levées de fonds, nous en détaillons chaque semaine sur le site de Trends-Tendances. Et bien souvent, elles conjuguent des investissements publics et privés. Ceux-ci ne sont pourtant pas forcément complémentaires, tant les logiques et les horizons d’investissement sont parfois très opposés. A quelles conditions les investissements publics et privés peuvent-ils se renforcer mutuellement plutôt que de se faire fuir l’un l’autre? Marek Hudon, professeur à la Solvay Brussels School ULB, a tenté d’y répondre dans un article rédigé avec l’appui de sa collègue Ariane Szafarz et de deux confrères américains, qui vient d’être publié dans la revue Perspectives on Public Management and Governance.

Des levées de fonds, nous en détaillons chaque semaine sur le site de Trends-Tendances. Et bien souvent, elles conjuguent des investissements publics et privés. Ceux-ci ne sont pourtant pas forcément complémentaires, tant les logiques et les horizons d’investissement sont parfois très opposés. A quelles conditions les investissements publics et privés peuvent-ils se renforcer mutuellement plutôt que de se faire fuir l’un l’autre? Marek Hudon, professeur à la Solvay Brussels School ULB, a tenté d’y répondre dans un article rédigé avec l’appui de sa collègue Ariane Szafarz et de deux confrères américains, qui vient d’être publié dans la revue Perspectives on Public Management and Governance. “L’enjeu est d’arriver à un montant substantiel d’investissements dans notre tissu économique, explique Marek Hudon. Nous sortons d’années durant lesquelles le niveau d’investissement a été trop bas dans la sphère publique mais aussi sans doute dans le privé. Nous avons donc essayé de voir comment des investissements publics pouvaient générer le plus grand effet d’entraînement sur le financement privé (crowding-in, dans le jargon scientifique).” L’étude analyse les fonds publics, mais aussi les fonds philanthropiques, qui brassent parfois des sommes faramineuses aux Etats-Unis. Ses enseignements peuvent largement s’appliquer aux fonds privés plus classiques, actifs dans notre économie, assurent les auteurs. Deux leviers publics sont particulièrement efficaces dans une optique de crowding-in: les garanties de crédit et les prêts à taux préférentiels. Ils ont l’avantage de réduire mécaniquement la prise de risque des investisseurs privés complémentaires. “Les prêts impliquent en outre des remboursements réguliers et génèrent ainsi une sorte d’effet de discipline, que l’on ne retrouve pas dans les subventions directes”, précise Marek Hudon. Les interventions publiques seraient essentielles pour les start-up qui, par essence, n’ont pas l’expérience et les références qui rassurent les investisseurs privés. Ceux-ci aiment donc s’appuyer sur le screening mené par les acteurs publics. “La Banque européenne d’investissement a des méthodes poussées sur ce plan, poursuit le professeur de Solvay. Quand elle valide un projet, l’effet boule de neige sur les grands fonds privés peut être assez impressionnant. Quand les acteurs publics parviennent à acquérir, grâce à leur expertise, une légitimité auprès des grands acteurs du marché, ils ont clairement un rôle positif pour le crowding-in. En ce domaine, la situation a plutôt bien évolué ces dernières années. La plus-value d’investisseurs publics du type finance.brussels, SRIW ou les invests wallons est largement reconnue. Nous sommes revenus du discours selon lequel l’importance du paysage public empêchait les fonds privés de se développer. On voit bien la complémentarité et plus encore depuis la crise du Covid-19. Sans le soutien public, nous n’aurions pas aujourd’hui des perspectives économiques aussi positives.” L’écueil, c’est ici notre découpage très géographique (invests régionaux et provinciaux), alors qu’une spécialisation thématique répondrait sans doute mieux aux exigences techniques et scientifiques de dossiers d’investissements de plus en plus pointus. “L’ancrage local a aussi son intérêt, nuance Marek Hudon. Les pouvoirs publics peuvent subventionner la constitution de compétences fortes, en particulier sur les innovations liées aux enjeux du futur. Il y a un consensus dans la littérature scientifique en faveur d’un financement public de réseaux – qu’on peut appeler pôles de compétitivité, centres d’excellence, clusters ou autres – qui développent une expertise qui bénéficiera à tous les acteurs.” Deux éléments sont essentiels pour que le financement public puisse entraîner des investissements privés: la transparence et la cohérence. “Quand on utilise l’argent du contribuable, il me paraît normal d’avoir une série de conditionnalités différentes de celles d’un investisseur privé, poursuit notre interlocuteur. L’investisseur privé peut parfaitement le comprendre, à partir du moment où les choses sont clairement établies, que l’on connaît les objectifs, l’horizon d’investissement, etc. Quand ce n’est pas le cas, quand par exemple, le fonds public n’a aucune stratégie d’exit définie au préalable, cela crée de la confusion, de l’incertitude. Et cela fait fuir le privé.” Le plan de relance européen serait, dans cette optique, plutôt bien balancé. La Commission a en effet défini une série d’objectifs environnementaux et sociaux à atteindre d’ici 2030 et 2050. Les investissements industriels susceptibles de contribuer à la réalisation de ces objectifs peuvent être soutenus par les pouvoirs publics et attirer des fonds privés même s’ils n’ont pas le ” return en equity” que visent d’ordinaire ces fonds privés. La mise en place d’une taxonomie européenne (classification des activités, selon leur durabilité) aidera aussi à faire le tri entre les projets réellement durables et ceux qui relèvent du green washing.C’est ici qu’intervient le souci de cohérence. “Si l’on soutient, comme c’est le cas, une filière hydrogène pour diversifier notre production de carburants, il faut bien veiller à ce que les moyens publics aillent à une production d’hydrogène qui aura un effet climatique positif, précise Marek Hudon. Sinon, cela revient à se tirer une balle dans le pied et cela fait fuir les partenaires financiers privés.” Il préconise d’approfondir le désinvestissement public dans les secteurs qui ont un impact climatique négatif, par exemple “les activités et secteurs liés aux énergies et combustibles fossiles”. “On ne peut pas s’attendre à ce que toutes les entreprises bénéficiant de financement public soient totalement exemplaires, convient Marek Hudon. Mais on peut par contre demander que ces financements publics les aident à le devenir à moyen terme et d’indiquer comment ils le feront. A nouveau, ici aussi, la transparence sur les performances me semble essentielle.” Le raisonnement ne concerne pas uniquement les fonds d’investissement. Les particuliers sont en effet de plus en plus attentifs à ce que leurs placements financent des projets à impact sociétal. “C’est une volonté affichée dans la plupart des enquêtes d’opinion, quels que soient d’ailleurs les niveaux de revenus, assure notre interlocuteur. Lorsqu’un citoyen est convaincu de l’impact sociétal d’un projet, il accepte une rentabilité plus faible.” Cette acceptation ne sera toutefois assumée dans la durée que si cet impact peut ensuite être mesuré de manière transparente. C’est le défi à terme pour des projets coopératifs ambitieux comme la banque NewB ou Ma ferme (Enghien), dont les activités démarrent maintenant après de spectaculaires levées de fonds.

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