Alors qu’une réforme des pensions complémentaires figure à l’agenda du gouvernement, le fisc remet en question certains aspects des plans de pension des dirigeants d’entreprise.
Indépendamment de la réforme des pensions complémentaires que prépare la ministre Karine Lalieux (PS), voilà que certaines informations parues dans La Libre font état d’une offensive du fisc à l’égard des pensions complémentaires réservées aux dirigeants d’entreprise. En cause : la fameuse règle des 80 % qui fixe le montant maximum des primes pouvant être versées annuellement par la société au profit de son dirigeant dans le cadre d’un Engagement individuel de pension (EIP). Une règle qui plafonne la somme de la pension légale et de la pension complémentaire à 80 % de la dernière rémunération annuelle brute “normale…
Indépendamment de la réforme des pensions complémentaires que prépare la ministre Karine Lalieux (PS), voilà que certaines informations parues dans La Libre font état d’une offensive du fisc à l’égard des pensions complémentaires réservées aux dirigeants d’entreprise. En cause : la fameuse règle des 80 % qui fixe le montant maximum des primes pouvant être versées annuellement par la société au profit de son dirigeant dans le cadre d’un Engagement individuel de pension (EIP). Une règle qui plafonne la somme de la pension légale et de la pension complémentaire à 80 % de la dernière rémunération annuelle brute “normale” et que le fisc interprète désormais de façon très restrictive. Et cela, “en tenant compte des recommandations de la Cour des comptes”, nous confirme Francis Adyns, porte-parole du SPF Finances.Dans un récent rapport, l’institution pointe en effet du doigt un avantage non négligeable de l’EIP : outre la déductibilité des primes au titre de charges professionnelles, c’est la possibilité d’intégrer dans ces 80 % les années antérieures pour lesquelles il n’y a pas eu de versement de pension (dans le jargon, back-service). “Jusqu’ici, indique Barbara Van Speybroeck, porte-parole d’Assuralia, si un employeur ou une entreprise ne choisissait pas de payer des cotisations de rattrapage pour les années prestées dans une entreprise précédente, logiquement, la pension complémentaire qui avait déjà été constituée auparavant n’était pas prise en compte pour le calcul de la prime maximale à verser sur la base de la règle des 80 %.” Pendant des années, le système n’a posé aucun problème. “Mais depuis un an maintenant, le fisc remet en question cette pratique, poursuit Barbara Van Speybroeck, Il fait systématiquement valoir qu’il faut toujours tenir compte de tous les droits à la pension complémentaire acquis auprès d’employeurs et d’entreprises antérieurs pour calculer la prime maximale, même si l’on ne souhaite pas rattraper ou valoriser ces années de carrière. Il effectue des contrôles sur les primes en remontant jusqu’à trois ans. La déductibilité fiscale des primes déjà versées est donc soudainement menacée, sans qu’il y ait eu aucune communication à ce sujet et sans que le marché ait pu l’anticiper.”Insécurité juridiqueLe revirement de l’administration n’est pas sans conséquence pour nombre d’entrepreneurs. Fin 2020, les réserves de pension des dirigeants d’entreprise représentaient plus de 19 milliards d’euros. Parmi eux figurent entre autres des salariés devenus indépendants qui se sont octroyé un faible salaire pour lancer leur activité et qui aspirent à se rattraper. Or, ajoute la responsable d’Assuralia, “si une règle, qui a été interprétée de la même manière pendant 30 ans reçoit soudainement une interprétation différente de manière rétroactive, la sécurité juridique peut être compromise. En pratique, il s’agit surtout de ne pas pénaliser les assurés qui se constituent une pension. L’interprétation de la règle des 80 % doit être équitable”, complète la porte-parole précisant qu’Assuralia demande d’entamer des discussions avec la ministre à ce sujet.