
Dans le contexte actuel de forte hausse des prix de l’énergie, certains fournisseurs se retrouvent en mauvaise posture en Belgique. Après la faillite du fournisseur d’énergie Energy2Business en septembre dernier, des bruits courent sur une potentielle mise en danger du fournisseur liégeois Mega. Fact checking.
Les prix de l’énergie atteignent des pics historiques ces dernières semaines. Ils menacent les acteurs du secteur en Belgique. Des sociétés pourraient tomber en faillite, faute de pouvoir absorber les prix record du gaz et de l’électricité sur le marché de gros. Si ces prix se maintiennent à un tel niveau, des sociétés verront leurs marges sous pression. Au sein du secteur, certains craignent que des fournisseurs soient en manque de liquidités en raison des montants croissants qu’ils doivent préfinancer. C’est principalement le cas pour les sociétés qui offrent des contrats à taux fixes à leurs clients et qui sont insuffisamment couvertes.
…
Les prix de l’énergie atteignent des pics historiques ces dernières semaines. Ils menacent les acteurs du secteur en Belgique. Des sociétés pourraient tomber en faillite, faute de pouvoir absorber les prix record du gaz et de l’électricité sur le marché de gros. Si ces prix se maintiennent à un tel niveau, des sociétés verront leurs marges sous pression. Au sein du secteur, certains craignent que des fournisseurs soient en manque de liquidités en raison des montants croissants qu’ils doivent préfinancer. C’est principalement le cas pour les sociétés qui offrent des contrats à taux fixes à leurs clients et qui sont insuffisamment couvertes.Le couperet est déjà tombé sur Energy2Business. A la suite d’un jugement du 13 septembre 2021 du Tribunal de l’Entreprise de Liège, le fournisseur d’énergie de petite taille a été déclaré en faillite. La société comptait en Wallonie et à Bruxelles un peu plus de 3.000 entreprises clientes. Des bruits courent ces dernières semaines sur une hypothétique faillite du fournisseur liégeois Mega. Le fournisseur traîne en effet plusieurs casseroles ces derniers jours qui pourraient mettre la puce à l’oreille dans ce sens. Au début de ce mois, Mega a ainsi relevé, sans prévenir, les acomptes mensuels de ses 600.000 clients, et cela, même pour des contrats fixes en cours. Ce qui laisserait penser qu’il a besoin d’avances financières.Cette pratique n’est pas illégale mais elle est contestée par Test Achats, qui la juge “déloyale” pour ses clients. L’organisation de défense des consommateurs estime que le fournisseur ne respecte pas ses propres conditions générales ni l’Accord consommateur qu’il a signé.Pour Stéphane Bocqué, communication manager de la Febeg, la fédération qui représente le secteur de l’énergie, cette augmentation d’acompte n’a, en réalité, rien “d’illégitime”. “C’est une pratique courante que d’ajuster les acomptes pour obtenir une facture de régularisation la plus proche possible de la consommation finale. Cela va dans un sens comme dans un autre. L’année passée, plus de 2 millions de clients ont demandé, à l’inverse, que leur acompte soit diminué.” Mega n’est d’ailleurs pas le seul fournisseur à le faire, ajoute-t-il. De nombreux consommateurs, dont le contrat fixe arrivait à échéance à un moment où Mega proposait encore des contrats fixes sur le marché ont, par ailleurs, été transférés vers un contrat variable sans leur accord explicite. Or cette pratique est interdite par l’Accord consommateur, signé par Mega.Autres indices: Mega ne recrute désormais plus de nouveaux clients. En ligne, celui qui se positionne comme le fournisseur “le moins cher de Belgique” indique à ses candidats clients qu’il ne peut plus leur offrir de contrat concurrentiel en raison des prix record sur le marché. Mega avertit que la prochaine livraison ne pourra se faire qu’à partir du 1er janvier 2022. Ses opérateurs seraient aussi difficilement joignables pour des questions ou des changements et cessations de contrats, selon des sources anonymes. De là à faire planer la menace d’une faillite imminente ? On peut se poser la question mais on n’en est pas encore là. Pour 2021, il n’y a objectivement pas d’éléments qui disent que la situation est à ce point problématique pour le fournisseur.Si on se penche sur ses comptes, entre 2019 et 2020, Mega a vu une forte croissance du nombre de clients, avec une hausse de 45%, passant de 390.000 à 567.000 clients. Ce qui a résulté en une augmentation de son résultat net (EBIT). La santé financière de l’entreprise semble donc bonne. Ses marges restent cependant très faibles, le coût de la vente étant proche du produit de la vente. Julie Frère, porte-parole de Test Achats explique : “La situation financière du groupe avant la flambée était très bonne, et maintenant, cela dépend de leur exposition : leur marge étant faible, le risque de difficultés financières est réel si Mega n’a pas acheté suffisamment d’énergie pour ses contrats fixes lorsque les prix étaient bas, et qu’elle doit désormais s’approvisionner à des prix élevés.”Julie Frère poursuit : ” Si Mega a vendu beaucoup de contrats fixes à un moment où les taux étaient très bas, ça peut hypothétiquement mettre à mal sa rentabilité financière. Mais, ces informations-là ne sont pas publiques, on ne les connait pas, on se renseigne auprès des régulateurs qui reçoivent des informations des fournisseurs.” Michael Corhay, le directeur général de Mega, répond à ces informations sur la situation financière de la société : “Notre santé financière est très bonne. Le groupe a fait 15 millions d’euros de bénéfices en 2020, la santé financière est bien là. On est largement bénéficiaire et on compte encore sur la profitabilité en 2021 et 2022 malgré les conditions difficiles sur le marché”, nous explique-t-il. Il ajoute: “La raison principale de notre bonne situation financière, c’est que Mega n’est pas fortement exposé aux contrats fixes. Mega vend en réalité beaucoup plus de contrats variables que de contrats fixes. On a moins de 40% de contrats fixes chez tous nos clients, car la majorité des fixes arrive à échéance cet hiver. La majorité est en contrat variable. Cela veut dire qu’on n’est pas vraiment exposés à devoir acheter l’énergie plus cher que ce qu’on ne la vend. Cela nous protège du risque d’un hiver qui serait plus froid où on devrait acheter de l’énergie très chère et la proposer à un prix plus bas au client.” “La proportion de contrats fixes est largement inférieure au marché, ce qui explique aussi l’augmentation des acomptes. Quand la creg annonce que les contrats des clients font augmenter de 700-800 euros par an, c’est irresponsable de ne pas proposer d’augmentation d’acompte à nos clients”, justifie Michael Corhay.Le but déclaré de Mega dans l’augmentation des acomptes des contrats fixes, réalisée certes de manière peu transparente, est donc bien de protéger le client pour ne pas qu’il ait une facture de régularisation de 1000 euros à la fin de l’hiver. Le CEO de Mega invite d’ailleurs tous les consommateurs en Belgique à augmenter leur acompte. Proposer un contrat fixe n’est pas responsable pour le client, estime Mega, les prix actuels du marché étant très chers. “Les prix actuellement sont élevés et stables. C’est le pire moment du marché. Le problème est concentré sur les 6 mois d’hiver. A partir d’avril 2022, on peut déjà prédire que les prix vont chuter de 50%. Le prix du gaz sera divisé par deux en avril et l’hiver prochain, il sera 50% moins cher. Si on propose un contrat fixe, les prix seront élevés cet hiver alors que deux trois mois plus tard on pourra proposer des contrats 30-40% moins chers”, argumente-t-il.Après les critiques sur sa communication peu transparente, Mega assure que tous les clients qui ne peuvent plus profiter d’un contrat fixe en sont informés par mail, en leur annonçant qu’il est préférable de passer au contrat variable. Concernant les difficultés à joindre le fournisseur, Michael Corhay nous confie que les call centers de la société sont débordés pour le moment mais que chaque client, s’il n’arrive pas à joindre un opérateur, reçoit une réponse par mail dans les 72 heures. Sophie Lenoble, présidente de la Creg, le régulateur du gaz et de l’énergie, déclare suivre la situation de tous les fournisseurs de près dans ce contexte de prix de gros élevés. Elle dit ne pas disposer d’informations officielles sur d’éventuelles difficultés rencontrées par le fournisseur liégeois en particulier. Sophie Lenoble tient à préciser concernant la récente faillite du fournisseur d’énergie Energy2Business que ce dernier était déjà en difficultés avant que la hausse énergétique ne vienne encore plus le fragiliser. La Creg renvoie vers une étude récente réalisée sur la hausse des prix de l’énergie. La Creg organise également une concertation hebdomadaire avec ses homologues régionaux afin de réagir si des difficultés de cet ordre devaient être observées.Les différents acteurs du secteur que nous avons contactés, dont Wikipower, qui conseille les consommateurs sur les prix de l’énergie affirment ne pas avoir non plus d’informations alarmantes sur la situation de Mega.





