Les entreprises publiques, ça le connaît. Mais, après vingt ans de bons services, le capitaine de la Sonaca retourne vers le privé, à la tête du discret mais costaud groupe Etex. Rien n’arrête ce boss qui aime l’action et le rock.
Mais pourquoi son départ fait-il autant de bruit médiatique? Après tout, que Bernard Delvaux quitte un poste de direction pour un autre, à 55 ans, rien de plus normal. Le Liégeois se dit qu’à l’approche de la soixantaine, il est temps de s’engager dans un dernier défi. Plutôt anodin. Sauf que la Sonaca n’est pas n’importe quelle entreprise. C’est un “fleuron” wallon, selon le terme consacré, qui s’est imposé dans le petit monde sélectif de l’aéronautique, en se profilant comme un spécialiste mondial des slats et des flaps (bords d’attaque et volets mobiles) pour des colosses comme Boeing, Airbus, Bombardier ou le brésilien Embraer.
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Mais pourquoi son départ fait-il autant de bruit médiatique? Après tout, que Bernard Delvaux quitte un poste de direction pour un autre, à 55 ans, rien de plus normal. Le Liégeois se dit qu’à l’approche de la soixantaine, il est temps de s’engager dans un dernier défi. Plutôt anodin. Sauf que la Sonaca n’est pas n’importe quelle entreprise. C’est un “fleuron” wallon, selon le terme consacré, qui s’est imposé dans le petit monde sélectif de l’aéronautique, en se profilant comme un spécialiste mondial des slats et des flaps (bords d’attaque et volets mobiles) pour des colosses comme Boeing, Airbus, Bombardier ou le brésilien Embraer. Depuis son embarquement en 2008, le directeur désormais sortant a su faire prendre un bel envol international à cette société détenue par la Région wallonne. Son bilan est fort bon, même si la crise sanitaire a fait plonger le chiffre d’affaires de la Sonaca en 2020. Bernard Delvaux a l’étoffe d’un grand patron, qu’il n’est guère étonnant que le groupe de construction Etex (ex-Eternit) soit venu démarcher. Il a aussi su se tailler, au fil des années, une place de choix sous les projecteurs. Il est un CEO qu’on écoute, d’autant qu’il a le verbe franc et aussi une gueule qui crève l’écran, un peu à la Gabriel Byrne, cet acteur irlandais qui s’impose à la caméra d’un seul regard. Alors que, depuis vingt ans, il n’a eu des fonctions dirigeantes que dans des entreprises publiques (Belgacom puis La Poste, avant la Sonaca) et été pressenti pour diriger la SNCB ou la FN, Bernard Delvaux n’a jamais hésité à secouer le cocotier politique belge, en irritant parfois plus d’un représentant dont Charles Michel. On se souvient de la carte blanche détonante qu’il a signée, en 2016, avec deux autres capitaines d’industrie, Johnny Thijs et Baudouin Meunier, appelant les autorités à “revitaliser ce pays qui laisse l’impression de ne plus fonctionner”. Le texte avait d’ailleurs inspiré l’initiative citoyenne e-change à laquelle Delvaux a contribué.Pour ce grand défenseur de la réindustrialisation wallonne, il n’y a pas de fatalité: dans un monde où les acteurs économiques sont devenus dominants, les politiques ont encore le pouvoir de faire évoluer les règles du jeu. Mais, chez nous, la machine est grippée, dénonce-t-il régulièrement, à cause de la lasagne institutionnelle et du consensus à la belge qui rend les partis traditionnels de plus en plus marginaux. Il assure cependant n’avoir jamais nourri d’ambition politique. “Manager de l’année 2013”, il dit n’être investi “que” de la vocation de chef d’entreprise, mais il verrait quand même bien nos gouvernants s’inspirer de sa stratégie, soit fixer des objectifs et un cadre clair puis déléguer la gestion du quotidien. Cet ingénieur civil de l’ULiège n’a, lui, jamais été un spécialiste du core business des entreprises dont il a tenu les rênes, avant d’y débarquer. Mais il a toujours eu une capacité d’écoute, une vision et un style pour donner les bonnes impulsions. Jusqu’ici, ça lui a réussi. Son retour dans le privé (il a commencé chez Cockerill avant de devenir un McKinsey boy, dans les années 1990) ne devrait pas museler – au contraire – cet avocat du pluralisme et de la liberté de la presse. Eternel lecteur de journaux comme son père, il a participé, en 2019, à l’offre de rachat, avec le groupe IPM, des Editions de l’Avenir, par “curiosité intellectuelle” selon ses propres termes. Il n’aura, en revanche, pas davantage de temps libre pour jouer au tennis, sa passion, ou retourner voir en concert les groupes rock dont il raffole, comme Elbow.