En plus d’être une “catastrophe pour le peuple russe”, avec “les sanctions contre la Russie, l’Europe doit éviter de se tirer une balle dans le pied”, estime Roland Gillet, professeur d’économie financière à la Sorbonne à Paris et à l’ULB (Solvay). “Épargner les vies des Ukrainiens est le plus important pour le moment, même s’il faut donner pendant un certain temps l’impression à Poutine qu’il existe encore sur la scène internationale”.
L’Europe peut-elle aller encore plus loin dans ses sanctions ?
Avec les sanctions encore plus fortes contre la Russie, l’Europe peut se tirer une balle dans le pied. Les prix de l’énergie sont tirés vers le haut. On n’a pas de réelles alternative à court et moyen terme. On ne peut donc pas se passer du gaz et du pétrole russe en Europe. La Russie est le troisième producteur de pétrole au monde, cela dérègle tout un marché déjà sous pression. On doit en outre payer en devises sonnantes et trébuchantes le gaz et le pétrole sinon on n’est pas livrés. Chaque fois que Poutine crée un sentiment plus fort sur la violence de ce qu’il fait, les prix flambent davantage, et même si on lui achète un peu moins de pétrole, il est quand même gagnant au final pour financer ses efforts de guerre. Cela ne vaut pas la peine d’imposer de nouvelles sanctions si Poutine reçoit suffisamment de moyens pour financer ses actions.
…
Avec les sanctions encore plus fortes contre la Russie, l’Europe peut se tirer une balle dans le pied. Les prix de l’énergie sont tirés vers le haut. On n’a pas de réelles alternative à court et moyen terme. On ne peut donc pas se passer du gaz et du pétrole russe en Europe. La Russie est le troisième producteur de pétrole au monde, cela dérègle tout un marché déjà sous pression. On doit en outre payer en devises sonnantes et trébuchantes le gaz et le pétrole sinon on n’est pas livrés. Chaque fois que Poutine crée un sentiment plus fort sur la violence de ce qu’il fait, les prix flambent davantage, et même si on lui achète un peu moins de pétrole, il est quand même gagnant au final pour financer ses efforts de guerre. Cela ne vaut pas la peine d’imposer de nouvelles sanctions si Poutine reçoit suffisamment de moyens pour financer ses actions. On peut aussi se demander jusqu’où on peut aller dans les sanctions sans rendre le principal investigateur encore un peu plus fou. Poutine pourrait toujours faire miroiter la menace nucléaire. Il faut certainement laisser une porte de sortie à une négociation pour ne pas le coincer au point qu’il se sente tellement perdu qu’il commette un geste de folie. On est peut-être les plus forts au niveau de l’OTAN en matériel militaire, mais n’oublions pas que la Russie dispose du plus grand stock d’ogives nucléaires. Je ne pense pas que c’est ce qu’il va faire, loin de là, mais il faut laisser la place à la négociation. On a déjà tapé très fort, mais ce n’est pas en rajoutant des sanctions que cela va modifier fondamentalement les enjeux. Épargner les vies des Ukrainiens est le plus important pour le moment même s’il faut donner pendant un certain temps l’impression à Poutine qu’il existe encore sur la scène internationale.Oui, c’est une catastrophe pour le peuple russe qui n’y est pour rien dans ce conflit et qui ne prend pas part aux discussions. Le PIB ces dernières années est passé de 14.000 euros par habitant à 11.000 euros. Le peuple est, en majorité, très pauvre et souffre énormément. Les Russes ne manqueront sûrement pas de faim – la Russie est un gros producteur de blé – mais tous les autres biens importés vont leur coûter 30% de plus. La Russie s’est enrichie grâce surtout à son sous-sol riche en gaz et en pétrole. Mais les retombées de la flambée des prix du pétrole ne sont pas utilisées pour le peuple, mais tristement en efforts de guerre. La Chine joue un double jeu avec la Russie, elle n’est pas neutre dans ce conflit. Elle a un peu le même souci avec les Américains en Mer de Chine niveau de Taïwan. Elle se positionne et va, de toute façon, profiter de la situation. C’est un pays très consommateur en termes de matières premières et pouvoir prendre des sources d’approvisionnement comme le gaz et le pétrole aux Européens sur le long terme ne leur pose certainement pas problème. Le pipeline Nord Stream 2 a été abandonné et un gazoduc vers la Chine est déjà programmé avec Gazprom. C’est déjà une manière de s’approprier l’énergie russe. Les Chinois indiquent aussi aux Américains qu’ils sont plus mitigés sur leurs responsabilités en insistant sur le fait que selon eux les USA ont mis de l’huile sur le feu dès le départ et que ce n’était pas nécessaire de mettre autant de pression sur la Russie. La Chine joue un rôle important pour le moment, également si elle rentre dans la négociation pour isoler et calmer Poutine. Il sait qu’il a un soutien chinois d’abord sur le plan militaire et que les revendications liées au territoire chinois – comme Taiwan – peuvent le servir. C’est encore trop tôt pour le dire. Une entreprise peut suspendre ses activités, éventuellement rapatrier son personnel, mais ne peut pas quitter un pays du jour au lendemain. Il est difficile d’estimer maintenant combien de temps le conflit va durer, tout est très évolutif. Si la guerre cesse, tout pourrait également aller assez vite. Dans de tels moments, on a tendance à envisager le pire comme si c’était du définitif, alors qu’on ne peut rien planifier. On ne sait pas non plus quel impact pourrait aussi avoir un changement de régime… Il faut rester prudents et ne pas penser que des sanctions de court terme devront nécessairement être maintenues. Il faut surtout essayer à l’heure actuelle de ramener Poutine à une raison même relative et à la table des négociations