Les salons internationaux de l’automobile sont en crise. Alors que celui de Bruxelles est suspendu à la décision du groupe Stellantis (fusion de Peugeot, Fiat, Opel et Citroën) , celui de Munich est le premier à reprendre depuis la pandémie. Il tente une formule hybride en s’ouvrant aux vélos et aux start-up. Les voitures présentes y sont surtout électriques.
Les habitués du Salon de Francfort, qui a déménagé à Munich, ont dû être dépaysés. Ce qui était le plus grand salon automobile au monde a tenté une mue. Le IAA (Internationale Automobil-Ausstellung) s’appelle désormais le IAA Mobility et s’est ouvert du 7 au 12 septembre.
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Les habitués du Salon de Francfort, qui a déménagé à Munich, ont dû être dépaysés. Ce qui était le plus grand salon automobile au monde a tenté une mue. Le IAA (Internationale Automobil-Ausstellung) s’appelle désormais le IAA Mobility et s’est ouvert du 7 au 12 septembre. La difficulté de l’exercice, c’est que depuis quatre ou cinq ans, les grands rendez-vous internationaux comme les salons de Francfort, Genève ou Paris ne sont plus incontournables.Déjà avant la pandémie, certaines marques les boudaient, les estimant moins utiles à leur marketing à l’heure d’internet et des médias sociaux. Le IAA Mobility de Munich confirme le mouvement. Les absents sont très nombreux: Volvo, Jaguar, Stellantis (Peugeot, Citroën, DS, Fiat, Opel, Chrysler, Jeep, etc.) et beaucoup de marques asiatiques, comme Toyota. Seules les allemandes sont au complet. Sera-ce aussi le cas chez nous? Le Salon de Bruxelles parvenait, juqu’au covid, à rassembler toutes les marques du marché, mais son organisation en janvier 2022 est encore en discussion à l’heure où nous mettons sous presse (lire l’encadré ci-dessous). Une raison supplémentaire d’éviter les salons est qu’ils deviennent des aimants à manifestations. Ils attirent les protestataires de la lutte contre le réchauffement climatique, les anti-auto et surtout anti-SUV. Ce fut le cas, assez spectaculaire, à Francfort en 2019, et aussi un peu à Bruxelles en 2020. Munich n’y a pas échappé: le salon a également attiré des contestataires, par exemple des militants de Greenpeace. Les dirigeants de l’IAA Mobility ont pourtant cherché à renouveler le salon en l’ouvrant à d’autres mobilités et à des start-up, et en le répartissant entre les palais de la foire de Munich et la ville afin de le populariser davantage. Un salon hybride, en somme, avec des open spaces d’accès gratuit, installés par les constructeurs. Mercedes a ainsi érigé sur l’Odeonsplatz un pavillon couvert de végétation, avec des haut-parleurs diffusant des chants d’oiseaux, le tout à deux pas de la statue équestre de Louis Ier de Bavière. Bilan: l’IAA a attiré 400.000 personnes. L’idée du salon dans la ville a été fort discutée. “Une des ironies de cet IAA est qu’il transforme la ville la plus congestionnée d’Allemagne en une zone sans voiture – car les voies sont fermées -, tout en y garant des véhicules”, commentait le magazine Der Spiegel, illustrant la difficulté de changer la formule.Les habitués des salons, eux, se sont trouvés un peu décontenancés, d’autant que les modèles présentés étaient peu nombreux… et presque tous électriques, bien que les voitures vendues soient encore massivement thermiques. Le stand VW, par exemple, ne comprenait quasi que des modèles ID (électriques). Renault, lui, a consacré son stand à la Mégane e-Tech électrique qui sera commercialisée l’an prochain et à la préfiguration de la future Renault 5 électrique. Même chose pour BMW. Pour voir les derniers modèles à carburant de l’entreprise bavaroise, il fallait plutôt visiter l’imposant BMW Welt, à quelques kilomètres de là, à côté du siège du groupe. Dans son pavillon installé sur la Witellsbacherplatz, Porsche a fait exception, exposant quelques automobiles à carburant, à côté d’un Taycan Turbo S (électrique, 0 à 100 km/h en 2,6 secondes)… équipé d’un porte-vélo, signé Porsche évidemment. Pour Renault, la présence à Munich est une manière d’afficher sa sortie de convalescence après une séquence de crise et juste après les résultats encourageants du premier semestre, meilleurs qu’anticipé. “On est passé d’une marge de – 6,5% au premier semestre 2020 à + 2,8% en 2021. On est combatif et cela donne une visibilité”, a déclaré Luca de Meo, le CEO du groupe français, sur son stand à Munich. La Mégane électrique symbolise ce renouveau. Elle vise le coeur du marché de Renault: “La Mégane a de la gueule, c’est un produit émotionnel. Le challenge, c’est de faire que la voiture électrique ne soit pas un frigidaire sur roue”. Cette phrase résume le dilemme des constructeurs présents au salon ; ils sont poussés à donner de plus en plus de gages sur les questions environnementales, à venir afficher leur volonté de mieux recycler, recourir aux énergies alternatives, produire propre, avec des véhicules zéro émission… tout en restant attractifs pour toute la clientèle. BMW a sans doute fait le plus grand écart sur ce terrain. Le constructeur promet qu’en 2030, la moitié de ses véhicules vendus seront électriques. Il annonce aussi vouloir passer à 50% de matériaux recyclés dans ses véhicules, le niveau actuel se situant “juste en dessous de 30%” selon un communiqué. A Munich, le CEO de BMW, Oliver Zipse, a présenté la vedette du stand: un concept car électrique, iVision Circular, en matériaux recyclés à 100% (y compris les batteries). Avec une carrosserie en aluminium recyclé, non peinte mais anodisée, sans aucun chrome, avec un intérieur excluant le cuir, fait de tissus, selon une conception simplifiée au maximum. “Avec un tableau de bord flottant, les informations seront uniquement projetées sur le pare-brise”, ajoute Oliver Zipse. Un véhicule électrique au format d’une VW ID. 3 Série 1, qui ne mise pas sur des lignes félines. En somme, un véhicule premium repensé en circuit court. Mais pas pour tout de suite: BMW parle de l’horizon 2040. D’ici là, le constructeur ne veut pas brusquer ses clients. Les modèles électriques qui sortent ne diffèrent pas dans leur design des BMW thermiques. C’était le cas du SUV iX3 qui remporte un bon succès en Belgique, du SUV plus grand iX et du coupé quatre portes i4, qui arrivent. Tous arborent les mêmes lignes, la calandre maison avec son “double haricot”, signature de la marque bien qu’un tel équipement ne soit pas nécessaire pour une voiture électrique. Quant aux manifestations qui ont émaillé le salon, le CEO du groupe VW, Herbert Diess (un ancien de BMW) estime qu’elles sont organisées au mauvais endroit. “De mon point de vue, cela n’a aucun sens que nous soyons au centre des manifestations”, a-t-il expliqué au Süddeutsche Zeitung, le quotidien de Munich. Pour un peu, le CEO irait les rejoindre mais devant un ministère. “Tant qu’il y aura des économies qui investissent des milliards dans la promotion des énergies fossiles, il est difficile aux constructeurs automobiles de s’y opposer.” L’homme pousse à sortir plus rapidement du charbon, énergie importante dans la production d’électricité en Allemagne, et à mettre fin aux avantages fiscaux, “qu’il s’agisse du diesel ou du kérosène”. Il faut dire que le groupe VW a investi des dizaines de milliards d’euros pour concevoir ses modèles électriques. Moins les carburants seront intéressants à utiliser, mieux il arrivera à rentabiliser ce passage à l’électrification et à oublier le dieselgate qui a coûté si cher à VW et à sa réputation.