Le marché immobilier du sud de la France ne fait pas exception: la crise sanitaire stresse la demande. En six mois à peine, on est passé d’un marché d’acheteurs à un marché de vendeurs.
Le marché immobilier français n’est pas vraiment réputé pour son extrême dynamisme ou sa grande volatilité. Mais comme chez nous, la crise sanitaire a décuplé l’intérêt pour l’immobilier avec (grand) espace extérieur. Selon une étude de la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), le nombre de ventes de maisons à la campagne a grimpé de 6,6% en 2020. Le prix moyen a grossi de 6,4%.
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Le marché immobilier français n’est pas vraiment réputé pour son extrême dynamisme ou sa grande volatilité. Mais comme chez nous, la crise sanitaire a décuplé l’intérêt pour l’immobilier avec (grand) espace extérieur. Selon une étude de la Société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), le nombre de ventes de maisons à la campagne a grimpé de 6,6% en 2020. Le prix moyen a grossi de 6,4%. Dans les régions côtières également, les prix ont le vent en poupe. Sur base des chiffres de Real Advisor, le journal Le Monde évalue les hausses de prix entre 5 à 10% sur un an, avec des pics de 44%. Peut-on parler de ruée sur les secondes résidences dans les régions très appréciées des vacanciers comme la Provence ou la Côte d’Azur? “On ne peut pas véritablement parler de ruée mais 2021 sera assurément une année exceptionnelle, répond Jan Vermeijen, agent chez Wretman Estate. Le chiffre d’affaires global de 2020 – année record s’il en est – était déjà atteint fin avril 2021.” Jan Vermeijen officie dans le Var, dans la région de Fayence plus précisément. “La région est très prisée, poursuit-il. Depuis la crise du coronavirus, les gens recherchent la tranquillité, la nature et l’espace, trois grands atouts de la région. De nombreux acheteurs viennent des grandes villes. Et de Monaco. Les Monégasques ont apparemment très mal vécu le confinement.” Rudi Janssens, propriétaire de Janssens Immobilier Knight Frank, souligne lui aussi le caractère exceptionnel de la période actuelle. “En mars 2020, le marché a été mis brutalement à l’arrêt par la crise sanitaire mais je n’en reviens toujours pas de la rapidité du redressement, confie-t-il. Du jamais vu en 23 ans de carrière.” Rudi Janssens possède dans le triangle Uzès/Mont Ventoux/Saint-Tropez 11 agences immobilières spécialisées dans l’immobilier de qualité et de prestige. “La seconde résidence reste un produit de luxe, insiste Rudi Janssens. La plupart de nos clients disent avoir toujours rêvé d’acheter une seconde résidence dans le coin. Ces deux caractéristiques, le rêve et le luxe, expliquent la lenteur de notre marché. Les candidats acquéreurs prennent leur temps. Mais la crise sanitaire a tout chamboulé. D’un simple rêve, la seconde résidence est devenue une priorité dans l’esprit de nombreuses personnes.” Un constat corroboré par les chiffres de son réseau d’agences. “Au printemps 2020, nous recevions 500 requêtes par mois. Nous en sommes aujourd’hui à près de 1.100 par mois.” Ces demandes émanent principalement de Français, ce qui n’a rien d’étonnant dans le contexte actuel de restrictions de voyages. “En temps normal, il y avait autant d’acheteurs étrangers que français, constate Rudi Janssens. Maintenant, huit acheteurs sur dix sont français. Mais les étrangers, les Belges en tête, reviennent en force. Plusieurs ventes ont été conclues en ligne, une grande première. C’était impensable il y a quelques années. Même si la vidéovente reste l’exception, elle témoigne indéniablement de l’empressement des acheteurs.” Confirmation de Jan Vermeijen: le nombre d’acquéreurs étrangers a baissé l’an dernier. “Les Britanniques et les Scandinaves étaient aux abonnés absents mais reviennent peu à peu.” A l’instar de Rudi Janssens, l’agent constate la même urgence du côté des candidats à l’achat. “Ils se décident nettement plus vite.” Selon les statistiques de Real Advisor, les prix varient considérablement d’une région à l’autre. Sur le littoral du midi de la France, les maisons se négocient au prix médian de 5.500 euros/m2 mais à Saint-Jean-Cap-Ferrat, Real Advisor enregistre une moyenne de 22.965 euros/m2. A l’intérieur des terres, l’immobilier résidentiel est clairement moins onéreux, dans une fourchette de 2.000 à 6.000 euros/m2. “Le prix au mètre carré n’est pas vraiment parlant, fait remarquer Rudy Janssens. Sur notre marché, la valeur affective joue elle aussi un rôle important. Le marché qualitatif à l’intérieur des terres, dans ce qu’on appelle la Campagne provençale, se situe entre 1 et 2 millions d’euros. Au-delà des 2 millions, on parle de marché de luxe, à savoir les villas et les mas dans de grands domaines. Plus près de la côte, les prix de l’immobilier de qualité grimpent rapidement dans une fourchette de 1,5 à 3 millions d’euros. Quant à l’immobilier de luxe, ses prix varient de 3 à 7 millions d’euros.” La plupart des biens repris dans le portefeuille de Jan Vermeijen tournent autour des 800.000 euros. Que peut-on espérer pour ce prix-là? “Une belle villa en bon état de trois ou quatre chambres avec un grand jardin d’une trentaine d’ares et une piscine. Et une belle vue avec un peu de chance.” L’attrait du marché pousse-t-il les prix à la hausse? “De façon limitée pour le moment, répond Jan Vermeijen. Il y avait beaucoup de biens à vendre mais si l’emballement se confirme, des augmentations de prix ne sont pas exclues.” Rudi Janssens envisage des renchérissements conformes aux données de Real Advisor. “Les prix sont en hausse, indéniablement, confirme-t-il. D’après nos statistiques, les prix demandés sont en moyenne de 10% plus élevés que ceux de l’an dernier. La marge de négociation a fondu comme neige au soleil. En temps normal, l’acheteur arrive à faire baisser le prix de 5 à 10%. La possible ristourne est aujourd’hui de 0 à 5%.” L’époque actuelle est donc tout sauf normale car l’offre restreinte peine à satisfaire la demande frénétique. “Nous constatons que les propriétaires de seconde résidence ont tendance à postposer leur éventuel projet de vendre, indique Rudy Janssens. Ils ont eu tout le loisir d’en profiter pendant la crise sanitaire. Pourquoi vendraient-ils maintenant?” Au printemps 2020, l’agent immobilier avait 650 biens en vente contre 365 aujourd’hui. “C’est très simple, dit-il, en six mois à peine, nous sommes passés d’un marché d’acheteurs à un marché de vendeurs.” Les candidats acquéreurs ont-ils intérêt à patienter? A en croire Rudi Janssens, le marché local devrait continuer à surperformer dans les prochaines années. “Je ne vois que deux dangers potentiels, explique-t-il. Primo: un changement du contexte politique. Les prochaines élections présidentielles auront lieu en avril 2022. Une victoire des extrémistes pourrait impacter l’activité immobilière. Les récentes élections régionales sont toutefois rassurantes à ce niveau. Secundo: si la crise sanitaire devait avoir de nouvelles répercussions économiques, le marché immobilier s’en ressentirait inévitablement.” “Est-ce le bon moment pour acheter? Cela dépend de nombreux facteurs, y compris personnels, réagit Jan Vermeijen. Il ne faut pas espérer une baisse notable des prix. Par contre, l’offre devrait être un peu plus étoffée d’ici à la fin de l’année. L’acheteur aura alors un peu plus de choix.”